Athena & Jordan

Athena avait passé la nuit et toute la matinée au club, dans la ville à coté de Jake Town. Elle s'était acharnée sur ce pauvre punching-ball pendant une bonne partie de la nuit, puis avait assuré quelques cours durant la matinée. Elle y avait d'ailleurs croisé Jack, mais ils n'avaient même pas eu le temps d'echanger quelques mots car le devoir l'avait appelée. En plus de ça, elle s'était occupé de réparer quelques sacs. Le club appartenait à un homme d'une cinquantaine d'années et il n'avait pas vraiment les moyens de renouveller le matériel très souvent. C'est pourquoi il fallait parfois racomoder les sacs ou les gants. Elle en avait aussi profité pour faire le tri et ranger le hangar, faire les comptes. Puis elle avait finalement quitté le club, s'assurant de refermer derrière elle, puis enfourchant sa moto et se dirigeant vers Jake Town. Elle entreprit de prendre la grande route mais finit par passer par les petites routes et chemins de terre passant à travers Green Wood. C'était le chemin le plus court, et le plus rapide, car tout simplement peu fréquenté depuis l'histoire du lac aux corbeaux. Personne en effet n'osait plus s'y aventurer, mais Athena n'avait pas réellement peur. Elle arriva donc vers 13 heures devant chez elle, puis rangea sa moto dans son garage. Elle ne prit pas la peine de retirer son jean légèrement sale au niveau des chevilles suite à cette expédition, et sortit directement pour se diriger vers le parc. Elle n'avait rien à faire et se disait qu'aller boire un café au Saunder's était une bonne idée, c'est pourquoi elle traversa Elizabeth Park pour gagner le centre.
Alors qu'elle déambulait sur l'un des petites chemins pavés mais pourtant recouverts de terre, elle apperçut au loin une silouhette qui lui était familière. Ces cheveux bruns, cette silouhette et démarche plutot féminines, même à cette distance elle pouvait y mettre un nom. Jordan, oui c'était bien ça. Cette fille qui l'avait harcelée une nuit pour avoir une cigarette, à tel point que depuis, Athena la haissait vraiment. Elles se livraient alors une sorte de guerre où tout est permi, bien que peu de choses ne touchent réellement Athena.
Un léger sourire se dessina sur ses lèvres, se disant qu'elle pouvait oublier son café car elle avait des choses bien plus amusantes à faire. Lorsque la jeune brune arriva à sa hauteur, Athena l'ignora complètement et passa à coté d'elle en lachant un petit rictus moqueur. Elle entendit alors l'autre s'arrêter. Athena fit de même et se tourna, le regard noir, pour faire face à la jeune fille.

© tryciäa & starship

J'entends la porte de la maison s'ouvrir alors, que je suis sur le canapé. Je dis rien, j'ai la flemme de lui parler. Je suis beaucoup trop fatiguée. J'connais Darren, la seule chose qu'il va me dire c'est que je devrais me calmer sur l'alcool et c'est justement ça que je n'ai pas envie d'entendre. Ça me gonfle d'une façon pas possible, que mon petit-frère me dise ce que je dois faire. Il monte les escaliers et je me redresse. Je vais dans la cuisine, j'ai faim. J'attrape des gâteaux et je me pose sur la chaise. Je pose mon coude sur la table, je suis fatiguée. J'appuie ma tête sur ma main et j'ai envie de m'endormir. Mon frère entre, il va encore me dire ce que j'ai à faire et ça va encore m'énerver. Je le regarde avec mon air qui veut dire : me saoule pas, c'pas le moment. Il prend la bouteille de Coca et repart dans sa chambre. Depuis quand il me dit rien ? Je dois avoir l'air choquée, mais wouah. Il doit penser que je suis une perte de temps, il va surement m'ignorer. C'est le seul truc qui m'atteins vraiment. Enfaite mon frère est le seul mec qui peut avoir des paroles qui peuvent vraiment me blesser, enfin y a pas que lui... Mais je pense trop à Nate en ce moment, je devrais l'oublier. C'est moi qui suis partie, alors j'ai rien à dire. J'ai qu'a assumé ma décision, plus facile à dire qu'à faire. Hier soir, j'ai fait un concours de shooters de Tequila avec un client. J'ai gagné. Le mec a perdu, dans sa race. On ne me défit pas sur l'alcool, ni sur les joints. Ce n'est pas une bonne idée, sauf si on veut perdre son argent. Moi ça ne me dérange pas, j'gagne du fric en plus, c'pas ça qui va me gêner. J'me lève et je range le paquet de gâteaux. J'ai plus très faim en fin de compte. Ça fait un mois que je suis une loque. Pourquoi ça irait mieux aujourd'hui ? Aucune raison, c'est bien ce que je pensais. Je monte dans ma chambre et je vais me doucher, je mets longtemps. Je pense trop sous la douche, je réfléchis à pleins de trucs ce qui fait que je mets quarante-cinq minutes avant de sortir. Je sors de la douche et je me coiffe. Vite fait. Puis je sors de ma salle de bain et je m'habille. Un jean et un t-shirt. J'enfile une veste, je prends mon téléphone et mon iPod et je sors de chez moi.

Je ne sais pas vraiment où je vais. Je connais tellement bien Jake Town, que je n'ai plus peur de me perdre. La plupart du temps, je marche et je vagabonde passant devant le Bistro, où j'irai travailler ce soir, le commissariat où je me suis déjà retrouvée dans une cellule de dégrisement pendant une nuit. Enfin bref, je marche la musique à fond dans les rues de Jake Town. Je pense à rien, c'est une bonne chose parce que depuis un mois, quand je me mets à penser – sauf quand je suis bourrée –, je pense à Nate. Ça me gonfle de tout le temps penser à lui. Je trouve ça hypocrite de ma part en plus. C'est de ma faute, mais si ça se trouve, lui il m'a oublié, alors je devrais faire la même chose. Ça ne doit pas être compliqué d'oublier quelqu'un... Mais non, ce serait trop facile. Je suis sado, ça doit être ça. J'aurais surement dû être égoïste... ça m'aurait fait du bien pour une fois. Je ferais mieux de me concentrer sur la musique, ça m'évitera de penser de la merde. J'entre dans le parc. J'avais fait des conneries dans ce parc quand j'étais petite. Des croches-pattes aux gens qui passent, c'était et c'est toujours tellement drôle de voir les gens tomber parterre. Personne ne me soupçonnait, j'avais l'air trop sage pour ça. Je crois que c'est moi qui ai appris à Darren à faire des croches-pattes. Je suis tellement une pro. Je regarde devant moi chose que je n'ai pas réellement faite depuis que je suis rentrée dans le parc et je vois une blonde arrivait en face. Fuck, j'la connais elle. Athena, je l'aime pas cette fille. Elle m'aime pas non plus, je me souviens plus trop pourquoi, une histoire de harcèlement pour avoir une clope. Faut pas me croiser quand j'suis bourrée. Elle passe à côté de moi en m'ignorant avec un sourire moqueur sur les lèvres. Je m'arrête. « C'est drôle de provoquer les gens en se foutant de leur gueule. Quoique j'sais pas trop, je l'ai jamais fait. Je suis plutôt du genre à me foutre de la gueule des gens devant eux et en leur disant, moi. »

Il y a des gens avec qui la provocation ne fonctionne pas, Athena en avait fait l'expérience plusieurs fois déjà. Mais ce n'était manifestement pas le cas de Jordan qui s'arrêta alors net. Habituellement, Athena adorait détester les gens, mais Jordan, elle aurait en fait préféré ne jamais avoir à la supporter, parce qu'elle n'était pas drôle. Elle était si ennuyeuse, pas le genre de personne qu'Athena prenait plaisir à haïr. Mais elle ne pouvait résister à cette envie d'emmerder le monde, et c'est pourquoi elle devait, elle avait absolument besoin de la provoquer. C'est pourquoi lorsqu'Athena entendit Jordan s'arrêter, elle fit de même et pivota lentement, d'un air las, mais avec un grand entrain intérieur. Elle la fixa tout en l'écoutant, gardant ce sourire sur ses lèvres, très léger pourtant car elle ne souriait que très peu. Elle montra un air plutôt détaché, pour bien faire sentir à Jordan que ce qu'elle pouvait bien raconter lui importait très peu. Mais Athena l'écouta tout de même. Lorsque la jeune brune eu fini, Athena afficha un air sombre et menaçant, bien contrasté de son sourire, pouvait même inquiéter la personne face à elle. Mais ce n'était pas son but, elle ne s'en rendait même pas compte car c'était tout simplement sa vraie nature qui reprenait le dessus. Dès la première seconde de sa vie où elle avait aperçu Jordan, elle avait su que cette fille allait la faire chier. Et ça n'avait pas raté car son intuition s'avéra juste. Elle regarda Jordan pendant quelques instants, son regard noir et perçant planté dans celui de la jeune fille. Puis, après un moment, elle se décida finalement à lui répondre, de sa voix grave et sur un ton calme et pourtant presque lugubre.

- Drôle n'est peut-être pas le mot, nan... Je dirais plutôt... apaisant.

Une grande partie des gens ne verrait vraiment pas ce qu'il y a d'apaisant là-dedans, mais une grande partie des gens avait déjà cessé d'essayer de comprendre Athena. Elle savait ce qu'elle ressentait, et peu importait ce qu'on pouvait en dire ou en penser. Elle avait une façon de fonctionner assez particulière et originale, façon de voir les choses bien différente, et c'était bien pour ça qu'elle n'allait pas chercher plus loin. On pensait ce qu'on voulait d'elle, c'était pas son problème. Elle n'avait pas à changer pour plaire aux gens, soit elle leur plaisait, soit elle leur plaisait pas, c'était leur problème, pas le sien. Athena maintient alors son regard sombre et son visage dénué de toute expression si ce n'est un profond dégoût qui ne se voyait pas tellement. Puis elle continua à fixer Jordan, calmement.